adieu interj.
1.◆ Formule de salutation employée en abordant ou en croisant quelqu’un que l’on tutoie,
en particulier un enfant.
1 « Je lui dis : “Adieu, ça va, la vie ?” » MeijerEnq 1962, p. 68.
2 « Lorsqu’on salue un copain qui vient vous rendre visite, on a coutume de dire, en Suisse
romande : “Adieu ! Comment ça va ?” Le mot “adieu” est ainsi utilisé dans un sens d’accueil, et non pas seulement dans une idée de séparation. » La Liberté, 14-15 août 1976, p. 2.
3 « […] le cordial salut genevois : — Adieu técole [= toi], quand repars-tu ? » La Suisse, 20 septembre 1993.
2.◆ Formule de salutation employée en prenant congé de quelqu’un que l’on pense revoir
dans un avenir proche (réservé au tutoiement).
4 « Agray n’ouvre pas la bouche. Même pas pour un grognement qui aurait pu passer pour
un salut. / – Adieu, Adèle. / Et Cujean sort, cependant que la porte se ferme sèchement sur ses talons. » S. Chevallier, Le Silence de la terre, 1961, p. 98.
5 « Je te dis adieu, à demain. » MeijerEnq 1962, p. 68.
6 « Ducret, ce n’est pas un adieu [v. rem. ci-dessous] que je t’adresse, mais un au revoir. Adieu Ducret ! » IttCons 1970, p. 54.
7 « Sophie au téléphone : – […] Ah ! il pleut, comme c’est triste !… Oui, bien sûr, les
communications depuis là-bas ; alors adieu, ma petite Monette, et va bien, oui, oui… je lui dirai, adieu, adieu, adieu… » G. Clavien, Un Hiver en Arvèche, 1970, p. 100-101.
↪ V. encore s.v. tout de bon.
◇ (Loc. excl.) Adieu je t’ai vu ! Exclamation exprimant la déception, la déconfiture.
8 « Tout de même, le bassin est en place… mais sans le noyer au greffier, adieu, je t’ai vu ! » D. Baud-Bovy, L’Homme à la femme de bois, 1970, p. 133.
9 « Les malheureux migrants, toujours plus interchangeables, ne seront que des matricules,
des maillons de la chaîne de production qui doit assurer la prospérité des entreprises.
Leur pensum accompli, adieu je t’ai vu ! » La Liberté, 27 janvier 1990.
Localisation. 1 est très courant en Valais, et connu dans 〈Canton de Vaud〉, 〈Canton de Neuchâtel〉 et 〈Canton de Berne (Jura Sud)〉 ; il reste peu connu dans le Jura. 2 est usité un peu partout en Suisse romande.
Remarques. 1 est concurrencé par bonjour, bonsoir et surtout salut (qui, comme adieu, est restreint au tutoiement) ; 2, par au revoir (vouvoiement), salut et ciao (tutoiement). — Le sens de “salutation employée en prenant congé de quelqu’un qu’on ne pense plus revoir” est aussi connu en Suisse romande, cf. citation de IttCons, ci-dessus, qui joue sur les deux emplois du mot.
Commentaire. Les plus anciennes attestations de 1 en Suisse romande remontent à 1808 (DeveleyVaud),
1820 (GaudyGen) et 1825 (GuilleDial). Quant à 2 (attesté indirectement depuis 1808
en Suisse romande, DeveleyVaud), il était non marqué en France jusqu’à la fin du xixe siècle (v. Littré ; cf. TLF 1, 667ab : « Au revoir dont Littré ne parle pas sous adieu, l’a peu à peu supplanté du moins dans l’usage courant, adieu étant réservé à la séparation définitive au ton quelque peu solennel ou d’une intense
affectivité ») ; l’emploi suisse romand ne représente donc pas une innovation mais un simple fait
de conservation. La locution Adieu je t’ai vu ! apparaît pour la première fois en 1852 (HumbGen) ; elle est également usitée en Savoie
(v. ConstDésSav, GuichSavoy), ainsi qu’en Haute-Saône (avec le sens de « Ni vu, ni connu ! » J.-P. Chambon, comm. pers.). V. encore DRF. — L’emploi de adieu pour au revoir et pour bonjour est attesté sur une grande partie du domaine galloroman : en plus de la Suisse romande,
on le rencontre dans le Haut-Jura, en Savoie, dans tout le Midi et jusqu’en Charente-Maritime.
Le mot est passé à la Suisse alémanique (SteinerLehnw), où on l’emploie couramment
pour prendre congé.
Bibliographie. DeveleyVaud 1808 n° 391 ; GaudyGen 1820, 1827 ; DeveleyVaud 1824 ; GuilleDial 1825,
p. 5 ; PeterCacol 1842 ; HumbGen 1852 ; CalletVaud 1861 ; GrangFrib 1864 ; BonNeuch
1867 ; ConstDésSav 1902 ; SteinerLehnw 1921 ; Pier ; GPSR 1, 119 s.v. adieu 1° ; FEW 3, 58a, deus 2 ; BrunMars 1931 ; MiègeLyon 1937 ; MichelCarcassonne 1949, p. 11 ; TLF 1, 667ab ;
RLiR 42 (1978), p. 155 ; NouvelAveyr 1978 ; RézeauOuest 1984 ; « rég. (Sud de la France) bonjour ou au revoir » GR 1985 ; BouvierMars 1985 ; TuaillonSurv ; GuichSavoy 1986 ; DurafHJura 1986 ; MartelProv
1988 ; SuireBordeaux 1988 ; CampsLanguedoc 1991 ; BoisgontierAquit 1991 ; BoisgontierMidiPyr
1992 ; « salut, bonjour ; globalement connu » FréchetMartVelay 1993 ; « expression courante autrefois » RobezMorez 1995 ; « employé par tous les informateurs » FréchetAnnonay 1995 ; DRF 2001.
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